mardi 25 mai 2010

Hippie dans l'âme

21 mai au Chili...
Certains se lèvent tôt ce matin pour aller manifester en protestation de la venue de Piñera à Valparaiso, président chilien depuis mars 2010, venu dresser un programme d'action du gouvernement devant les députés; comme le veut la coutume chaque année au Chili afin d'ouvrir la session ordinaire parlementaire.
D'autres, moins convaincus par le fait d'aller brandir des pancartes et crier des slogans en tout et pour tout une grosse demie heure avant que les forces policières n'envoient leurs petits soldats sur la foule, bombes lacrymos au poing et uniformes playmobil protection XXL; prennent discrètement la poudre d'escampette par la porte arrière de peur que les flics présents par centaines n'arrêtent leur véhicule de fortune. Car le délit de faciès existe aussi au Chili, où un combi Volkswagen (de l'an mille av JC d'accord...) a beaucoup plus de chance de se faire arrêter que la dernière mercedes. Bref, passons.
Nous voilà donc en route tout fiers dans notre beau combi, se croyant presque acteurs principaux d'un film du style "Into the wild", direction la plage déserte a cette époque de l'année de Los Molles, petit bled seulement connu par les adeptes du surf et windsurf.
Trois jours a jouer les hippies, a dormir dans l'combi, a rêver les orteils enfouis dans le sable (froid a cette période de l'année) et a manger des fruits de mer au port, parce que faut pas déconner on est hippie certes mais hippie un peu bobo quand même... ^^
Bref, un bon petit week end comme on les aime, en dehors des réalités et à des années lumières des conneries des hommes politiques qui font les guignols pendant que d'autres ne se prennent pas au sérieux.

mercredi 19 mai 2010

"Au mois de mai, faites ce qu'il vous plaît!"

Au mois de mai...
J'ai mis des gants et fait des tours à mon écharpe en sortant dans la rue.
J'ai payé une fortune des aubergines et me suis vue recommander des "fruits de saison" au mois de mai comme des oranges ou clémentines...
J'ai mangé des moules au parmesan comme l'ont fait ici sans m'en lasser.
J'ai fait un footing au travers des cerros, et un, ca monte, et deux, ca descend, et trois, slalom entre les chiens qui dorment, et quatre, un escalier a dévaler....
Je ne me suis pas levée le matin pour aller en cours, ou je me suis levée quand il n'y avait pas cours.
J'ai passé des journées a Santiago et ri très fort dans un bar de Bellavista où ils servaient des mojitos en happy hour.
J'ai vu un film francais dans un tout petit ciné ou enfin les sièges étaient rouges, la salle a taille humaine et les films provenant d'ailleurs que des studios des grosses productions américaines.
J'ai recu une tempête de pluie sur la tête en étant dans ma maison, et les plus grosses "fuites" se trouvaient au dessus des toilettes...
J'ai pensé très fort a ma Mamie.
J'ai mangé des "frites-saucisses grasses-oignons frits-œufs battus" dans un resto à la déco kitch d'une grotte de fête foraine en chantant Les rois du monde "Nous fait l'amour on fait la guerre on fait l'amour on fait la guerre...."
J'ai philosophé en espagnol sur "l'histoire sociale et culturelle de la maladie et de l'hygiène publique au 20ème siècle".
J'ai fait des crêpes qui ont constitué notre seule alimentation pendant 3jours., "parce que qu'en y'en a plus, y'en a encore"!
J'ai vu la mer et voudrait voir la mienne.
J'ai vu des marionnettes grandes comme des maisons dans la rue et des courts métrages que personne n'a compris.
J'ai appris les accords à la guitare, et j'ai les doigts durs comme de la corne a force de les répéter. (Faudrait ptet' passer a l'étape 2 me souffle t'on dans l'oreillette ...)
J'ai un chat suicidaire, gréviste de la faim et qui miaule comme une mouette. Allez comprendre.

J'ai vu Valpo au mois de mai et c'est ce qui me plait!

mercredi 12 mai 2010

Quand des maisons en kit effacent la misère du monde...

Cauquenes, week-end du 1er mai, 2 mois après le terremoto.
C'est une petite ville en bien mauvais état qu'on y trouve. Comme si on y avait soufflé comme l'on souffle sur un château de cartes. Mais cette fois les cartes éparpillées au sol sont des maisons. Des maisons dans lesquelles vivaient de vrais gens. Et les gens, ils sont en bien mauvais état aussi.

On est une petite dizaine, quelques potes de Valparaiso, quelques autres de Santiago: objectif du week end, construire une media agua, l'une de ces petites maisons en kit qui fleurissent partout au sud du Chili depuis le tremblement de terre. Cette media agua est pour une famille dont la maison s'est écroulée entièrement, il n'en reste plus rien, seule la dalle de béton indique au sol l'emplacement où elle se trouvait. Depuis ils vivent entre une cabane en bois où dorment Maria josé, 4ans, et sa grand mère; une tente pour les parents de Maria José; et une cuisine-camping à ciel ouvert, où règnent en vrac les fauteuils du salon, les jouets de la petite fille et le linge qui sèche là où bon lui semble.
"Pour le moment ca va, on se débrouille comme ca, mais on va arriver la période des pluies..."




Les voisins, quant à eux, attendent toujours leur media agua... "L'Etat n'en envoie pas à tout le monde, et puis comme je n'ai pas de petite fille, je ne suis pas prioritaire" nous raconte la dame d'à coté, à l'intérieur de sa baraque de fortune ou l'eau du thé chauffe dans un feu, à même le sol.


Un petit tour de la ville nous fait nous rendre compte que ca a frappé dur a Cauquenes, bien que 2mois après le terremoto, les rues ait été déblayées, les maisons qui ont souffert portent les lettres rouges des architectes volontaires venus après la catastrophe faire l'état des lieux ("D" pour demoler, démolition) et des coups de marteaux se font entendre à chaque coin de rue; signes d'une volonté archarnée de toujours reconstruire, ne pas se laisser aller au désespoir.


Pourtant, il aurait pu en être tout autrement. Nelly par exemple, aurait eu toutes les raisons de baisser les bras. Sa maison a elle aussi a finit par terre. Et le pire, c'est qu'elle était encore dedans, elle n'a pas réussi a sortir a temps. Mais elle est bien là, devant moi, les yeux en peu mouillés de me raconter que dans cette maison, elle y est née.
Depuis, elle vit dans une media agua, qu'un de ses neveux lui a construit. A elle non plus, l'Etat n'a pas pensé.
Elle nous invite a passer dans son nouveau chez elle, a prendre le petit déjeuner. Sa media agua ressemble presque a la maison qu'elle a du avoir, tableaux aux murs et dentelles sur les meubles. Mis a part le jour qui passe entre les lattes de bois et le froid ambiant.
Elle nous raconte qu'elle aurait aimé plus de solidarité entre les gens de sa rue, mais ici, c'est chacun dans sa misère et qu'elle ne peut compter que sur ses fils. Heureusement qu'ils sont là ses fils.
Je n'ose pas lui demander quels sont ses projets... Que peut imaginer pour son futur une petite Mamie de 75ans, sans revenu, sa maison qui lui est tombé sur la tête?





En plus de la media agua, on ramène des sacs remplis de vêtements que les gens de Santiago ont collecté pour l'occasion. On organise une grosse braderie où les gens arrivent pour choisir en fonction de leurs nécessités.
Dur de vouloir être équitable quand des personnes repartent avec 15kgs de vêtements sur l'épaule quand on voudrait qu'il y'en ait pour tout le monde; quand des petites mamies s'en vont les bras chargés de serviettes hygiéniques; ou quand quelques uns viennent tour à tour te glisser à l'oreille que "c'est une honte que Madame chose ose se pointer quand on sait qu'elle touche aux aides de l'Etat"...



Finalement, l'objectif sera atteint, après de longues heures de travail, de nombreux clous de plantés et une super équipe de gens en or. La famille de Maria José aura elle aussi sa media agua.

Cependant, je me demande en quoi se trouve la solution de donner aux gens ces maisons de fortune, où dans une des régions les plus pluvieuses du pays, passent le jour, l'air et le froid entre les lattes de bois? "C'est une solution provisoire" me répond t-on. Provisoire certes quand on a les moyens de se reconstruire quelque chose de mieux, mais quand ce n'est pas le cas, on voit ce qui se passe dans d'autres régions du Chili déjà affectées par d'autres terremotos; c est à dire des personnes qui vivent depuis des années dans ces media aguas, maisons de misère pour sauver la face du gouvernement. Donner l'impression d'agir quand on ne fait qu'enterrer le problème.